Dictionnaire amoureux de la France - [51]
Le lendemain, j’ai poussé jusqu’à Auch, en passant par Vic-Fezensac sans savoir que Lussac se trouvait à quelques kilomètres. Puis Toulouse par Gimont, Léguevin et L’Isle-Jourdain. J’ai dormi dans les parages, à la belle étoile, et le hasard m’a mis sur l’autoroute qui déjà doublait la nationale 113. Elle était fermée à la circulation car tout le monde faisait grève, y compris les pétroliers ; depuis Bordeaux j’avais les routes pour moi tout seul, je ne croisais que de rares cyclistes. Des policiers affables m’ont rempli le réservoir de mon Solex dont la sobriété était louable. Ils m’ont même autorisé à emprunter l’autoroute. Peut-être parce que je portais les cheveux courts. En ces temps-là, les cheveux sur l’oreille et dans le cou connotaient hippy ou gaucho, les flics préféraient les nuques rasées. De même les automobilistes. Mon passé d’auto-stoppeur m’avait instruit de cette circonstance, elle m’a valu d’être embarqué sous le nez de chevelus armés de guitares qui n’étaient sûrement pas plus mauvais garçons que moi.
Me voici seul sur l’autoroute, fou de bonheur, le vent de la liberté dans les voiles, ayant du loisir pour la savourer car nous roulions à trente à l’heure, maximum. Mon Solex n’avait rien à envier au « bidet jaunâtre » de d’Artagnan. J’ai dépassé Castelnaudary, baguenaudé dans la cité de Carcassonne, atteint Narbonne où s’embranche l’autre autoroute. Béziers sur sa butte a toujours l’air de défier un Simon de Montfort, son bourreau. Ou n’importe quel club de rugby de haut rang. J’étais depuis le départ en terres de rugby. Sur chaque nom de lieu je surajoutais des noms propres, Mantoulan à Lézignan (jeu à 13), les frères Spanghero à Narbonne, Danos à Béziers dont j’ai vainement cherché le bar sur les allées Paul-Riquet. J’ai dormi dans une cabane, au milieu d’un vignoble, vers Pézenas me semble-t-il. Où ai-je quitté l’autoroute ? Peut-être à Nîmes. J’ai dû faire une incursion en Camargue, à cause d’un film où Johnny chantait « Pour moi la vie va commencer ». Je parle d’un Johnny tendrement printanier, que les moins de soixante ans ne peuvent pas connaître. Souvenirs, souvenirs… Ils sont faramineux, les souvenirs en miettes de cette échappée belle. Je me revois traversant Saint-Rémy-de-Provence, puis sollicitant du « mélange à 5 % » pour mon brave Solex dans une gendarmerie dont les locataires avaient l’accent de Fernandel. Puis sirotant une limonade à une terrasse ombragée de platanes. Enfin débarquant sur la rade, bronzé comme un corsaire. La femme que j’aimais m’attendait sur les pentes du Faron, dans une maison cernée d’oliviers. Toulon s’apprêtait à jouer contre Lourdes la finale du championnat de France, mais la rencontre était reportée de dimanche en dimanche, à cause des grèves. Je piquais vers Mayol à la fraîche et j’assistais à l’entraînement des Porthos de la rade : Herrero, Carrère, Hache, Mouysset, Fabre…
Le même Solex, sous le même soleil, remonta la vallée du Rhône. Le mistral soufflait sur la nationale 7 dans le mauvais sens, un piéton aurait pu nous suivre. Une escale en face de Valence, sous le rocher de Crussol, chez des amis de la famille, une autre à Vichy, en famille, et nous sommes rentrés au village. J’ai dû pédaler un peu dans la côte de Volvic et dans la gorge du Chavanon, mais mon destrier n’a pas rendu l’âme. Je lui voue rétrospectivement de la gratitude et de la tendresse, il m’a permis de m’enivrer de liberté sur les routes de ce Sud français inégalement latin qui, selon qu’il ondule ou s’aplanit, nous tient lieu d’Andalousie ou de Toscane, d’Afrique à la rigueur et même de tous les Orients imaginables. C’était juste une parenthèse de félicité buissonnière car, le soir de notre retour, les pompistes ont repris le travail, les voitures se sont remises à rouler. Toulon a pu jouer la finale à Toulouse : match nul (9 à 9), mais victoire de Lourdes au bénéfice des essais.
Maigret
Simenon était belge mais Jules Maigret est une idéalisation du Français moyen, un héros ordinaire qui trimbale sur l’impériale d’un autobus une indulgence bougonne pour les passions humaines. Toujours les mêmes : la peur de manquer, le quant-à-soi, le désir de se prouver qu’on existe, la hantise du déclassement, la fuite dans l’alcool, le besoin de se rassurer, la frénésie du nihilisme, l’ivresse des sens. Il a éclos modestement dans un terroir banal, Paray-le-Frésil, près de Moulins où il ira au lycée. Son père était le régisseur de domaines appartenant à une famille de nobles comme le Bourbonnais n’en était pas avare. Juste au-dessus de la paysannerie, très en dessous de la bourgeoisie. Sur la trame de cette ambiguïté, l’histoire de Maigret est tributaire d’un drame initial, la mort précoce de sa mère lors d’un accouchement. Il traînera ensuite le regret d’avoir dû renoncer à terminer sa médecine (mort du père). En fait il aurait aimé exercer un métier qui n’existe pas, celui de « raccommodeur de destinées ». Ascension sociale régulière : il débute comme pandore en uniforme et finit patron de la Criminelle au Quai des Orfèvres. Mais jusqu’au bout il aura des comptes à rendre à des chefs — le directeur, le préfet de police, des ministres — et il ne forcera pas sur les notes de frais. C’est un fonctionnaire qui a réussi une belle carrière, sans en tirer la moindre vanité, sachant trop la minceur de la frontière qui sépare le glorieux du raté. Ses goûts sont d’un bourgeois plutôt petit que moyen : pêche à la ligne au bord de la Marne, belote avec des copains, petit blanc de pays siroté au zinc. Vacances aux Sables-d’Olonne avec Madame. Sur le tard il achète une télévision, comme tout le monde. Puis une voiture. Puis une maison à Meung, au bord de la Loire, dans la perspective d’une retraite qu’il appréhende autant qu’il la désire. Comme tout le monde. Il est souvent grippé, son foie s’engorge, il prend du poids et se sent vieillir. Il n’a pas d’enfant, autre regret. Son épouse Louise (fille d’ingénieur des Travaux publics, il a convolé au-dessus de son étiage) est idéalement effacée, vouée à son mari, à son ménage ; elle cuisine et tricote, postée dans une attente sereine.
Издание знакомит читателя с увлекательной историей зарождения и становления столичного футбола, его великими победами и горькими поражениями, славными традициями, сложившимися на протяжении более чем векового периода. Впервые документально обобщена и представлена обширная и интересная информация обо всех московских командах, тренерах и игроках, когда-либо выступавших в клубном первенстве Москвы (до 1936 г.), в высшем и первом эшелонах отечественного футбола, на крупнейших международных турнирах, рассказано о вкладе москвичей в успехи нашей национальной сборной команды.
«С Америкой на „ты“ — это второе издание справочника о современной Америке. Он адресован, в основном, тем, кто собирается или уже приехал в США. Автор книги Борис Талис, гражданин Америки, как и любой другой иммигрант, прошел нелегкий путь адаптации, не по наслышке знает о трудностях, с которыми сталкиваются те, кто волею судьбы оказываются в незнакомой стране, и искренне стремится им помочь.Из книги вы узнаете все самое важное о жизни в США! От государственного и политического устройства страны до житейских советов и пословиц.
Справочное пособие, рассказывающее о том, какими физическими и химическими способами привести в хорошее состояние загрязненную, испачканную при пересылке или небрежном обращении марку; как удалить различные пятна, случайно попавшие на марку; как освежить несколько выцветшие краски марки.
В книге в популярной форме рассказано об оружии, предназначенном для выполнения необычных боевых задач. В ней содержится информация о тактико-технических данных, принципах действия и устройстве основных типов оружия для войск специального назначения различных стран, о нестандартном вооружении спецслужб, а также об опытных разработках такого оружия. В ней также приведены сведения о некоторых военно-технических изобретениях, не нашедших широкого применения.Издание предназначено для всех интересующихся историей техники и современным оружием.
В книге рассказывается история главного героя, который сталкивается с различными проблемами и препятствиями на протяжении всего своего путешествия. По пути он встречает множество второстепенных персонажей, которые играют важные роли в истории. Благодаря опыту главного героя книга исследует такие темы, как любовь, потеря, надежда и стойкость. По мере того, как главный герой преодолевает свои трудности, он усваивает ценные уроки жизни и растет как личность.